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Sur le terrain: Howl Arts/Howl Archive

Écrit par

Jordan King
octobre 7th, 2021

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Niché au cœur du quartier effervescent du Lower East Side dans Manhattan, un nouvel espace rutilant a été inauguré à la fin du mois dernier : Howl Arts/Howl Archive.

Niché au cœur du quartier effervescent du Lower East Side dans Manhattan, un nouvel espace rutilant a été inauguré à la fin du mois dernier : Howl Arts/Howl Archive.  HA/HA (un acronyme réfléchi et intentionnel?) est une filiale de Howl! Happening, une petite galerie et un espace événementiel sur la 1e rue Est et Bowery sous la direction de la directrice générale Jane Friedman. Jane est une New-Yorkaise de toujours, ce qui est rare; elle participe depuis des décennies aux scènes underground influentes de New York dans les domaines de la musique, du théâtre d’art et du nightlife. Les deux espaces-sœurs Howl! s’engagent à résister au processus effréné d’embourgeoisement que connaît le quartier et de poursuivre le travail accompli par Howl! Happening (HH) depuis son lancement en 2015. Lors de ma visite à HA/HA, Jane s’est empressée de préciser que Howl ! Happening continuera ses activités — le lancement d’un plus grand espace ne signifie pas que le petit fermera ses portes.  

En tant qu’espace de galerie, Howl! Happening a accueilli une série d’expositions célébrant la culture unique qui a existé dans le secteur. L’exposition The Pyramid : Cocktail Lounge as Cultural Laboratory présentait le minuscule club de drag de l’East Village des années 1980 (un tremplin pour plusieurs légendes, notamment Lady Bunny, Rupaul) comme un espace où la horde magique du centre-ville de New York a directement influencé la culture et les médias d’une manière qui trouve encore écho aujourd’hui.  

Pour comprendre la programmation de la Howl! Happening, il faut posséder une certaine compréhension du milieu qui existait dans de l’East Village de New York et qui lui était tout à fait unique et spécifique : une contre-culture underground impossible à définir de manière précise. À New York dans les années 1980, la pollinisation croisée de la musique, de l’art et de la mode s’opérait aussi bien dans des sous-sols d’église (Club 57) que dans des théâtres abandonnés (The World) ou des lofts exclusifs (The Mudd Club). Souvent, les barrières socio-économiques venaient à disparaître temporairement dans ces espaces et de nombreux participants évoquent encore la réelle diversité de ces rassemblements.

Avec Howl ! Happening, Jane Friedman s’est efforcée de défendre les nombreux artistes qui ont apporté une contribution considérable à ces milieux et poursuivra cette mission dans le cadre de Howl! Arts/Howl! Archives. 

Je dois préciser ici que j’ai eu connaissance de l’initiative de Jane de lancer Howl! Archives bien avant qu’elle ne soit annoncée, lorsque je suis devenu responsable de la succession personnelle de l’artiste underground new-yorkais Clark Render après sa mort en 2019. Jane était une amie de longue date de Clark et une figure importante de sa vie. C’est à cette époque que j’ai appris que l’élaboration d’un tout nouvel espace était en cours et j’ai eu l’occasion de le visiter alors qu’il était encore inachevé.

Howl Arts/Howl Archive est perché au-dessus de la rue Bowery, une artère très fréquentée du Lower Manhattan et l’une des premières voies de circulation nord-sud qui a été établie lorsque New York était encore une colonie néerlandaise. Dans les années 1970, la Bowery était une rue connue principalement pour la présence de personnes qui auraient été considérées comme démunies. Les personnes sans logement, les centres d’hébergement pour sans-abri et les hôtels à chambre individuelle foisonnaient dans le secteur, quoique l’on n’en trouve plus guère de traces aujourd’hui. En revanche, Howl Archives tout de verre est discrètement situé au deuxième étage d’un bâtiment à l’apparence banale.  

L’audacieuse exposition inaugurale Icons, Iconoclasts, and Outsiders réunit des personnalités connues et d’autres, moins célèbres, qu’il s’agisse d’œuvres de Dee Dee Ramone réalisées en 2002, de documents personnels de Patti Smith datant de sa première tournée en 1975 ou même d’archives ayant appartenu à l’artiste drag Hattie Hathaway, l’une des principales forces créatives du club Pyramid club.

La sélection proposée est vaste. Des peintures et des livres sont exposés à côté de socles contenant des archives personnelles. Au total, 78 pièces sont exposées dans plusieurs salles de l’espace galerie, ainsi que dans deux salles vidéo plus petites. Une caractéristique remarquable des lieux est l’immense espace extérieur arrière : un spacieux patio doté de nombreuses places assises faisant face aux escaliers de secours couverts de vignes et de plantes des immeubles résidentiels voisins.  

Bien qu’il n’a pas été possible d’interviewer Jane en profondeur le jour de l’ouverture, j’ai pu lui demander quels étaient ses espoirs pour cet espace. Jane est une fervente partisane de la scène underground et a été une figure maternelle pour de nombreux membres de cette scène depuis longtemps. Il est clair qu’elle tient beaucoup aux artistes et aux icônes dont les œuvres ou les documents personnels sont exposés. Lorsque je lui ai demandé ce qu’elle espérait précisément offrir à la nouvelle génération d’artistes qui affluent toujours à New York, dans l’espoir d’être la prochaine Candy Darling, c’est sans hésitation qu’elle a répondu : « J’aimerais pouvoir les élever moi-même! ».  

C’est par pure coïncidence que, plus tôt dans la journée, j’avais passé du temps avec une jeune musicienne, artiste et mannequin en herbe qui avait quitté la Caroline du Sud pour s’installer à New York. Des visions d’une vie de superstar Warhol comme celle de Candy Darling pétillaient dans son regard. Compte tenu de la quantité d’archives offertes en ligne, les détails de la vie des figures du cinéma, de l’art et de la vie nocturne underground, ainsi que les images et les vidéos qui étaient autrefois très difficiles d’accès, sont désormais tout à fait accessibles. Mais faire défiler, consommer ou collectionner des images numériques est très différent de porter un regard critique sur l’héritage matériel de ces personnes. Par ailleurs, passer du temps avec ces documents en personne, ce qui sera possible à la bibliothèque Howl Arts/Howl Archive, est un acte d’observation et d’étude nécessaire qui n’est tout simplement pas possible lorsqu’il est fait virtuellement.  

J’espère que les jeunes artistes verront l’importance d’espaces comme Howl, et qu’ils et elles réinterpréteront et réimagineront de nouveaux chapitres pour les récits underground à la fois célèbres et éphémères dont ils et elles n’ont peut-être qu’une connaissance limitée.  

Candy Darling éphémères avec l’aimable autorisation de Jeremiah Newton

À la question de savoir ce qu’elle espère que la nouvelle génération retienne des œuvres et des archives des générations passées du centre-ville de New York, Jane a marqué une pause avant de répondre à ma question : « J’espère qu’ils et elles utiliseront leur talent, tout ce qu’ils et elles savent, pour créer un monde meilleur. »  

L’exposition inaugurale Icons, Iconoclasts, and Outsiders est présenté à Howl! Arts/Howl! Archive (HA/HA) jusqu’au 31 octobre 2021.

À propos de l’auteure

Jordan King est une artiste et rédactrice canadienne nomade. Elle anime actuellement un podcast mensuel de discussions pour le magazine en ligne du Centre Never Apart. Elle a travaillé au niveau international en tant que maquilleuse pour des clients sélectionnés tels que la DJ Honey Dijon, ainsi que sur des campagnes publicitaires, des défilés de mode et des éditoriaux de mode, qui sont en suspens en raison de la pandémie de la COVID19.

@jordankingarchive

jordankingarchive.com

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