In Spirit : Rencontre avec Stéphane Desmeules, photographe de la nature et des corps
De nos jours, il existe encore des personnes cachées dans notre société qui sont authentiques, discrètes, presque invisibles. Elles font ce qu’elles doivent avec une passion et une générosité sans prétention, ne cherchant pas à être connues ou reconnues. Ces personnes, je l’ai appris avec le temps, sont des plus importantes : elles sont les tisseuses de notre monde, la sève vivante de notre culture.
J’ai rencontré Stéphane en 2015. Du Canada à l’Inde, en passant par la France, nous avons voyagé et créé des histoires au fil du temps, des rencontres et des discussions. Je l’ai vu tomber amoureux du corps et de la nature, produire des photos qui reflètent les différentes étapes de son cheminement. Plus il rentrait dans un sujet, plus les autres s’enrichissaient et se structuraient. C’est un privilège que de pouvoir suivre un ami sur le long terme, et de se sentir le témoin privilégié du temps qui passe qui nous fait changer et mûrir.
Ce mois-ci, j’ai voulu vous le présenter en quelques mots, quelques photos. Humble présentation d’une personne et d’un artiste d’exception. Quelques traces, sur le chemin.
Mariette Raina : tu fais autant de photos de corps que de nature, y a-t-il un lien pour toi un entre les deux?
Stéphane Desmeules : j’aime photographier ce qui m’entoure, mais je suis spécialement émerveillé par ce qui est naturel, vivant. Ce qui est déposé au hasard, ce qui grandit, qui est mort, le temps qui passe, les saisons, le mouvement. J’aime être un témoin dont le regard permet au sujet d’exister. J’aime la façon dont la lumière naturelle révèle, met en valeur, chuchote les détails. Pour moi, le corps, surtout dans la nudité, fait partie de la nature… minéral, végétal, animal. C’est un grand tout.
Au courant des dernières années tu as exploré plusieurs techniques dans ta photo – microscopee, drone, 360 – pourquoi cette variété de technique et pourquoi en changes-tu régulièrement ?
J’aime varier les points de vue. Lorsque je limite la technique, je développe une expertise, je me spécialise. Puis un jour je ne me surprend plus, je deviens prévisible. La variété me permet de me mettre en position d’inconfort, de vulnérabilité. J’apprends, je ne sais plus rien. Je vois pour la première fois, je découvre. Puis vient ensuite le plaisir de découvrir un nouvel outil : piloter un drone, chercher un point de vue original, faire la mise au point sur un insecte, tout est prétexte à la redécouverte. C’est important pour moi de ne pas prendre pour acquis ce que j’observe. C’est une sensation grisante. Je pense que le défi technique me stimule autant que le fait de me mettre en danger dans ma pratique, mes connaissances.
Des étapes marquantes dans ta trajectoire photographique?
Lorsque j’ai mis la main sur un appareil photo, je dirais, c’était en 2014. Mais l’aventure a commencé bien avant, dans l’art en général, le dessin, les BD que j’ai illustrées, et l’enseignement dans le domaine du jeu vidéo. Puis certaines rencontres ont déclenché des envies. Motivé par le désir et le plaisir de créer, j’ai progressé significativement ces six dernières années.
Justement, tu as un background en Bande- Dessinée et en 3D, tu travailles pour une compagnie de jeux vidéos : qu’est-ce que t’apportent ces expériences dans la photographie?
D’une part, il y a la narration. J’aborde toujours mon sujet dans son contexte, avec une histoire à raconter. Cela donne un sens à ma photo. L’histoire est différente pour chaque personne, ou chaque paysage. Ça m’aide à insérer de l’émotion. Du moins, elle m’émeut lorsque je crée ou que je fais la retouche de mes photos sur l’ordinateur. Je plonge dans le narratif, je cherche à le mettre en valeur via des couleurs, des effets de lumières, de flou ou de mise au point. Puis il y a la technique, car elle me donne la capacité de faire parler les images avec plus d’aisance. J’utilise la 3D, l’illustration et le collage. Ça me permet d’ajouter des éléments ou d’accentuer des idées. Pour moi, le processus de travailler mes images en postproduction est aussi agréable que la chasse à l’image lorsque je photographie.
La place de l’environnement et de la spiritualité dans tes photos?
J’aimerais être plus proche de la nature, y vivre plus quotidiennement. Dans mon enfance, j’ai vécu plus proche de celle-ci mais depuis 26 ans, je suis en ville et je ressens le désir de m’y rapprocher: pour le silence, la qualité de la présence, du temps qui passe sans l’agitation de la ville. Pour la spiritualité, oui je fais des liens avec mon cheminement intérieur et ma démarche artistique. Entre l’observation de la vie autour de moi, la pratique concrète dans le quotidien, les remises en questions, la façon dont on s’explique les choses, qu’on se pardonne ou pas. Il y a forcément des liens avec ma spiritualité et l’art que je pratique. J’imagine que c’est pareil pour tous les artistes… notre art est forcément en accord avec nos valeurs et croyances. Consciemment ou inconsciemment.
Quel conseil donnerais-tu à des photographes qui débutent et cherchent à atteindre ton niveau?
Toujours pratiquer, pour soi, pour son plaisir, malgré la lenteur de la progression parfois. Même si c’est un peu cliché, je crois qu’il ne faut pas se préoccuper de la destination, mais du voyage.
About the Author: Mariette Raina joined the Never Apart Center team in 2016 as a monthly columnist. Her writing focuses on spirituality, art and environmental issues. Mariette has a master’s degree in Anthropology. She is also teaching yoga and photography that she approaches like self-reflective and introspective mediums.
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Liste des contributeurs sur les photos par ordre d’apparition :
Pascale Bernardin – écrivaine et modèle vivant
Yoann Savi – modèle et entraineur
Phylactère – modèle artistique
Taylor – photographe, modèle artistique et éducatrice sexuelle somatique
Jordan Faye – danceur de ballet
Melina Stinson – dancseuse contemporaine et éducatrice sexuelle
Michelle – photographe
Clara Cloutier – modèle artistique
Gerard X Reyes – chorégraphe, danseur et éducateur sexuel
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